L’Ouzbékistan, c’est la destination culturelle d’Asie Centrale qui monte… On comprend pourquoi quand on voit la grandeur et l’opulence de ses monuments emblématiques : mosquées, écoles coraniques et mausolées. Tout-à-fait époustouflants – parfois à la faveur de restaurations massives – tandis qu’on vogue entre les poétiques autant que sanglants héritages de Samarcande, Boukhara et Khiva.

Un pays qui, en héritage de l’URSS, aura été le théâtre du plus grand désastre écologique des temps modernes : l’assèchement de la mer d’Aral, conséquence de la culture intensive du coton. Culture du coton qui depuis des décennies reste le synonyme de travail forcé pour les ouzbeks, enfants comme adultes, redevables d’un quota annuel à l’État (qui annonce la fin de ce système pour 2023).
N’oublions pas pour finir cette introduction d’évoquer la merveilleuse et légendaire hospitalité des ouzbeks, dont nous allons pouvoir mesurer toute la portée dans les passages qui suivent 🙂
Étape 1 (mais aussi 3 et 5) : Tachkent
Nous arrivons à la capitale, Tachkent, après avoir traversé en bus la frontière depuis la ville kazakhe voisine de Shymkent, la conclusion de nos 5.000 kilomètres au Kazakhstan.
Première surprise : sur les bâtiments / panneaux officiels, le cyrillique s’efface pour laisser place à l’alphabet latin. Bienvenue en O’zbekiston. Et pour cause, parmi toutes les anciennes républiques de l’URSS, le peuple ouzbek est celui qui cherche le plus à se départir de son héritage soviétique (bien que la stratégie fut inverse à l’arrivée des russes à la fin du XIXème) ; l’alphabet en est un vecteur très tangible. Malgré tout, la capitale Tachkent reste une terre d’ancrage russe assez forte. Par sa taille, elle constituait d’ailleurs la 4ème plus grande ville de toute l’ex-URSS.
En témoigne cette église orthodoxe très active
Tachkent est une ville stratégique dans notre voyage également car c’est bien la capitale ouzbèke que nous avons sélectionné comme point d’ancrage pour la demande de nos visas pour les deux pays qui suivront : le Turkménistan et l’Iran. On passera ainsi une semaine complète à Tachkent, en trois fois ! C’est ainsi qu’en regardant la carte de notre périple ouzbek et ses allures de toile d’araignée, on devine facilement où se trouve Tachkent.

Heureusement c’est relativement facile de se déplacer en Ouzbékistan grâce au système de taxis partagés et grâce au train (pas de pugilat pour accéder aux guichets contrairement a ce qu’on avait pu lire, ou comme c’est le cas en Chine!)

Manger : Le restaurant au coin de la rue de notre hôtel The Nest était tip top. Un seul plat à la carte mais délicieux. À part cela les restaurants du centre sont bons, mais très onéreux (pour l’Ouzbekistan).
Voir : le Bazaar Chorsu qui est assez s’étend très largement autour de la coupole emblématique ! et à sa sortie : la madrasa Kulkedash, vraiment jolie. à proximité l’ensemble autour de la mosquée Khazrati Imam qui est vraiment très beau et nous a donné un avant goût de la suite ! Vers le centre ville, c’est le côté russe qui en impose.
Dormir : Étant donné nos pérégrinations on a testé pas moins de cinq hôtels à Tashkent (qui n’est pas une ville très bon marché) … 1/ A European Backpacker & Sakura Hostel l’ambiance est super chouette, mais les lits n’ont pas de matelas. 2/ The Nest hostel, tout juste ouvert par des jeunes, nickel bien qu’en rodage!
Le problème du retrait d’argent en Ouzbékistan : De notre expérience, il n’y a aucune banque qui accepte les cartes européennes type Visa & Mastercard hormis Asaka Bank (C’est possible de retirer des dollars également dans cette banque, de même qu’au Miran International Hotel) présente surtout à Tachkent. Donc faire le plein à Tachkent est crucial … et encore la liquidité au distributeur est aléatoire, cf photo. Il faut dire que c’est seulement en 2017 que L’État a arrêté de maintenir le soum (la monnaie nationale) a un taux artificiel. Bref un enjeu de taille pour nous d’autant qu’au Turkménistan et en Iran la totalité des cartes européennes est également complètement inopérante !

Étape 2 : La vallée de Ferghana, (3 jours)
Repiquant à l’est, nous pénétrons aux confins du monde connu du temps d’Alexandre le Grand, dans la vallée de Fergana coincée au nord, au sud et à l’est par les monts Tian Shan (monts célestes). Par une chaleur inouïe, on prend donc le train Tachkent – Kokand, pour une introduction en douceur aux merveilles architecturales qui firent la gloire de l’ancienne Transoxiane après les conquêtes musulmanes à partir du VIIème siècle.
En l’occurrence, Kokand était la capitale d’un des trois khanats (cité-état) du Turkestan jusqu’à l’invasion russe de 1876. Tous les bâtiments historiques de Kokand datent donc de cette période :
- le palais du Khan
- la madrasa Narbutabey, ses beaux dômes bleus clairs, et les mausolées attenants
- le musée de la mosquée Jami et son beau minaret
- et enfin la mosquée Zunbador et la madrasa Sahib Mian Hazrat, dans les ruelles derrière le musée.

Deuxième étape dans la petite ville Rishtan, centre de fabrication de la majorité des céramiques ouzbèkes ! A refaire, pas sur qu’on s’y arrêterait, car porter nos gros sac à dos sous un soleil de plomb était assez violent… l’atelier qu’on a visité était sympathique, mais pas totalement bouleversant non plus. La ville est à majorité Tadjik… et comme de juste on y a rencontré des jeunes tadjik super gentils.
Troisième étape, pour la nuit à Fergana dans la super guesthouse tenue par Maftuna (qui étudie désormais en France, mais a passé le relais à ses collègues). Mais notre véritable destination c’était Marguilan et sa fabrique de soie. On avait déjà passé le choc de voir les vers à soie bouillis et dépouillés, au Myanmar et en Chine donc cette fois-ci, on a simplement profité de la visite de cette très belle fabrique !
Shohjahon, un ami de Maftuna originaire de Marguilan, nous a fait visité sa ville : ainsi en plus de la fabrique de soie on a pu voir toutes (mais vraiment toutes) les mosquées de la ville ! Avec la chance d’assister à un appel à la prière du Muezzin.
Transports : 2 trains par jour (un le matin et un le soir) depuis et vers Tachkent… sinon des taxis partagés (200 000 soms à 3 depuis Marguilan). Possibilité de prendre des taxis partagés entre les villes dans la vallée : Kokand – Rishtan coûte 55 000 soms par exemple ; de Rishtan c’est très simple de prendre le bus pour aller à Fergana pour 4 500 soms. Un taxi partagé pour toute la matinée autour de Marguilan nous a coûté 65 000 soms. Dans Kokand le taxi est à 5000 soms en théorie.
Dormir : Kokand : Nigina hotel, 200 000 soms, grande chambre, assez loin du centre. Super découverte à Fergana avec le Minimalist hôtel de Maftuna pour environ le même prix.
Fun fact voitures : en Ouzbékistan, il y a quasiment uniquement des véhicule qui roulent au gaz (et donc le coffre est rempli par une énorme bombonne). Les explosions à la station service ne sont pas rares et il est donc obligatoire d’attendre en retrait … Par ailleurs il n’y a que deux marques : des Chevrolet (anciennement Daewoo) construites dans l’est du pays, dont le modèle « Damas » qui sont des minis-minis-vans à la forme beaucoup trop chouette !

Étape 4 : La cité mythique de Samarcande (3j)
En train, rejoints par notre copain Manu à Tachkent, nous avons ensuite rallié la ville qui incarne à elle seule la route de la soie (roulements de tambour), la seule et unique : Samarcande !
Un peu de contexte sur le pourquoi de ce mythe qui accompagne le nom de la ville.
Samarcande était la capitale de l’empire bâti par Amir Timur (ou Tamerlan, littéralement Timur le boiteux). Il a arraché bon nombre d’artisans à leurs vies (qu’on peut supposer) joyeuses dans les villes qu’il ravageait conquérait pour venir construire sa belle et tendre capitale de Samarcande. Même si le gouvernement ouzbek a érigé Amir Timur en héros national, il serait responsable de la mort de 5% de la population mondiale de l’époque (XIVème siècle). Les historiens parlent de la « catastrophe timouride » pour évoquer cette période.
Samarcande était, donc, une étape incontournable de la route de la soie. Cependant, la ville et ses bâtiments splendides ont été plus ou moins laissés à l’abandon notamment sous la domination soviétique (comme tous les autres monuments historiques en Ouzbékistan ou presque), et ainsi ce que l’on peut admirer à présent est systématiquement le produit de reconstructions ou de rénovations d’ampleur.
Ceci étant dit, la beauté de ces monuments reste stupéfiante :
– Le Régistan > on s’est décroché le cou à en admirer les détails, et à contempler la mosaïque centrale. On est resté des heures (pas d’exagération) à admirer ce bâtiment depuis l’esplanade voisine pour voir ses couleurs changer au soleil couchant… et parler anglais avec les très très nombreux jeunes ouzbeks venant y trouver des touristes avec qui converser.
– Shah-I-Zinda (littéralement mausolée du roi vivant) : des mausolées aux mosaïques incroyables ! Il faut s’y couvrir les épaules ! Entrée 15000 soms.
La mosquée de Bibi Khanoum (8000 soms) et le mausolée Gur-e-mi (15000 soms) sont également de très beaux monuments, mais moins impressionnants que les deux précédents !
Cerise sur la gâteau, on a été invités à un mariage ouzbek ! Se faire inviter à un mariage ouzbek mode d’emploi : chercher un restaurant, s’apercevoir qu’il a été transformé en salle de mariage pour le soir, rester 1 à 2 minutes planté devant, se faire repérer par des invités, puis se faire entraîner dans la salle … et à partir de là se faire placer à une table, boire (des shots de vodka, mais servis en gant blanc et costume 3 pièces), manger et danser comme jamais !

Dormir : Fayzi guesthouse, meilleure guesthouse de notre séjour, des gens adorables et une petite cour toute mignonne ! 51$ les 2 nuits à 3 sur Booking avec petit déj.
Manger : Au coin du Régistan, l’Altas était correct. Il y’a énormément de restaurants entre la mosquée Bibi Khanoum et le Régistan.
Transport : taxi pour 20 000 soms pour le trajet gare / centre.
Étape 5 : Boukhara, la cité caravanière millénaire (3j)
Un premier soir magique, à déambuler dans la vieille ville. Cette visite onirique au coucher du soleil reste l’un de nos plus beau souvenir d’Ouzbékistan.

Sortant de notre auberge (un ancien caravansérail), on a bifurqué vers la jolie petite mosquée Chor Minor, puis suivant des petites rues on a finalement débouché sur successivement : la place où les madrasas Mirzo Ulugbek et Abdul Aziz Khan se toisent (et rivalisent de beauté). Dépassant les beaux dômes du marché couvert, nous avons atterri sur la place autour du minaret Kaylon (avec la mosquée Kaylon et Mir I Arab), et enfin la place Lyabi Hauz, avec son bassin central, parcourant le reste des marchés couverts pour y accéder.
Sur les deux jours suivants nous avons visité le centre plus en profondeur et exploré sa périphérie, de l’Ark au Mausolée Safavid, en passant par la mosquée Bolo Khauz et la medrese Kosh.
Les bâtiments les plus intéressants à visiter restent :
- la mosquée Kaylon,
- et plus loin l’Ark
- et la mosquée Bolo Khauz (gratuite).
- La mosquée Magoki Attori et presque toutes les autres du centre, si elles ont des belles façades, ne valent pas vraiment le coup d’être visitées étant toutes très délabrées à l’intérieur.
Nous avons également pris notre courage à deux mains, et sommes partis au delà de la ville :
- À Chor Bakr, bel ensemble de mausolée et de mosquées à une quinzaine de kilomètres de Boukhara (1000 /1500 soms en bus / damas).
- A Nakshband, lieu Saint musulman, où se trouve le mausolée du grand homme religieux du même nom ! (15000 soms aller et retour). En faisant au retour un crochet par le palais d’été de l’Emir, mix flamboyant et Rococo entre style occidental et ouzbek.
Dormir : Mekhtar Caravanserail, un Caravansérail donc reconverti en hôtel très beau ! (85$ les 3 nuits / 3p avec petit dej).
Étape 6 : Le Karakalpakstan, Nukhus et la désolante mer d’Aral
De Bukhara, retour à Tachkent pour quelques jours afin de récupérer, de haute lutte, notre visa pour le Turkménistan. On aura quand même dû se pointer 6 fois à l’ambassade turkmène de Tachkent, dont trois fois à 5h du matin afin d’inscrire notre nom sur une liste, et en repartir pour mieux revenir plus tard dans la journée. A l’ambassade iranienne, deux passages suffisent pour débloquer notre demande de visa électronique ! On est parés pour le mois qui vient.
Visas en poche, on repart dans l’autre sens via un train de nuit, direction la gigantesque région autonome du Karakalpakstan. Elle dispose de son propre parlement, de son président, de son drapeau, d’une identité régionale forte… tout en répondant au pouvoir exécutif et législatif ouzbek. A Nukhus, on retrouve Chloé, Déborah et Eolia qui nous rejoignent et vont faire un bout de chemin avec nous !
On visite donc Nukhus, et son incroyable musée d’art, Stavisky – du nom de son fondateur, un ethnographe / artiste russe envoyé dans la région pour les forteresses de Karezm, qui en profita pour collecter l’art ouzbek et protéger dans son musée des toiles d’amis artistes moscovites désapprouvés par le régime ! En théorie le musée était fermé pour la journée mais Rafaelaaa a su jouer sa carte italophone pour nous faire passer avec un groupe d’italiens VIP au guichet.

Et puis on donne dans le « dark tourism »… à la mer d’Aral ! On a poussé jusqu’à Moynaq, ce qui encore récemment était un port de pêche et une ville côtière de cette mer. En fait jusqu’à la fin des années 70, sauf que depuis la mer a perdu 90% de son volume. Du coup, elle accueille désormais un cimetière de bateaux de pêche (plantés dans le sable) et un musée (15000 soms avec un film instructif).
Une catastrophe écologique 100% man-(soviet) made (parfois un doute subsiste, ici aucun).
3 étapes clés pour comprendre ce drame écologique :
1) l’URSS veut tenir tête aux US dans la production de coton, et ainsi cherche sur son vaste territoire le lieu le plus propice à la culture du coton…
2) l’URSS décide que ce sera l’Ouzbékistan avec son climat semi-désertique ô combien favorable …
3) l’URSS détourne les fleuves qui alimentent la mer d’Aral pour irriguer les champs de coton
Résultat : en 40 ans, la mer d’Aral s’est réduite comme peau de chagrin, la région est sinistrée et les sols salés et toxiques. En plus de l’esclavage lié au coton qu’on a évoqué plus haut. Bref HOURRA au génie qui depuis Moscou s’est dit « et si on faisait pousser du coton en masse au milieu du désert Ouzbek? ».

Dormir : Besqala (140$ les 2 nuits pour une chambre de 5), c’est super… mais il y a moins cher dans la ville !
Transports : Moynak, il y a quand même 3h de transport aller et retour ! Nous avons partagé un Damas pour 60$ (à plus de 5 on devient vraiment serrés). Il y a des bus qui permettent de faire l’aller retour dans la journée !
Manger : Délicieux (pour l’Ouzbekistan) et pas cher, le restaurant Altim.
Nukus – Ourgench / Khiva, le mieux est un taxi partagé pour 40 000 soms (âprement négocié) par personne.
Étape 7 : Khiva, la 3e cité d’or ? (2j)

Ô Khiva, khanat magnifique au centre historique magnifiquement préservé et restauré (peut-être trop, comme sur beaucoup de sites architecturaux en Ouzbékistan).
Et c’est encore une fois à la lumière dorée de la fin de journée que la ville est la plus bluffante !
- Au coucher du soleil ça vaut vraiment le coup de monter sur la tour de garde Nord (auquel on accède depuis l’Ark / le palais !
- A la nuit tombante, la tour Kalta Minor et les deux minarets Islam Khodja et Djuma (mosquée principale) sont particulièrement resplendissants !
Dormir : East Star Khiva, très beau et agréable (124$ pour 5 pour 3 nuits)… mais excentré (25 min à pied).
Transport : 10 000 soms le taxi pour notre guesthouse, excentrée comme souvent mais jolie !
Nous avons également fait une excursion à la journée pour visiter 3 des forteresses de Khorezm : Ayala Kala dans un décor grandiose, Toprak Kala la mieux conservée et Kizil Kala bien restaurée de l’extérieur. C’est intéressant, mais pas renversant non plus 🙂

Retour à Nukhus et droit vers la frontière turkmène
Depuis Khiva, on file en taxi partagé dans la grande ville de Ourgench où on dit au revoir aux filles. Puis on enchaîne vers Nukhus où on découvre cette fois son vibrant bazar. L’occasion de faire le stock de fruits secs et se s’enfiler des samosas à la kartofil. A côté, la gare de minibus locale, une armée de Daewoo Damas nous tend les bras. Deux correspondances de Damas plus tard et avec l’aide de bien des ouzbeks croisés sur le chemin, on attrape finalement un taxi pour la frontière turkmène.
Une demi-heure à sillonner une paysage toujours plus aride sans croiser grand monde et nous arrivons enfin au tant convoité Turkménistan, armés de nos visas obtenus de haute lutte. Feu vert pour 5 jours chez les turkmènes !
Taxi partagé de Khiva à Ourgench.
Taxi partagé de Ourgench à Nukus (au stade olympique, 45000som / personne, possible de négocier à 40000som) sur 3 heures.
Bus 5 de Nukus à Batis pour 1000som chacun depuis la gare attenante au bazaar.
Bus de Batis à Kojayli pour 1000som chacun.
Taxi de Kojayli à la frontière 15000som à deux.
